Benjamin Laroche: Méthode Jacotot en présence de l'Enseignement Universitaire - 7

Publié le par Joseph Jacotot



CHAPITRE III.

Application de L'Enseignement universel aux diverses branches d'enseignement. Instruction aux mères.

Après avoir établi ces grands principes qui servent de base à tout le système, déduisons-en les conséquences; faisons-en l'application à la pratique; et, pour mieux faire ressortir la différence qui existe entre l'enseignement universitaire et l'enseignement universel , mettons-les tous deux en présence.

Commencons par le commencement.

L'enfant est né, et à peine ses yeux se sont-ils ouverts à la lumière, qu'il fait de l'enseignement universel... En effet, il voit... Bientôt il apprend à comparer ce qu'il voit à ce qu'il a vu; il établit des rapports; il entend des sons, il les imite ; il cherche à les interpréter, il y réussit ; il balbutie, puis il parle, et toujours par le grand principe de l'enseignement universel. Il s'instruit lui-même. Il apprend quelque chose ; il y rapporte tout le reste; il voit, compare, juge et retient. Allez le mettre à l'enseignement universitaire, si vous pouvez. Vous n'avez garde. Vous laissez agir la nature, la nature et sa mère ; et ces deux guides admirables sont bien supérieurs à vos bonnets carrés, voire même à vos hermines.

Aurore de la vie, âge heureux de la première enfance! vous échappez, par votre faiblesse même, à la férule abrutissante, et vous vous réfugiez dans le sein d'une mère. Cependant les premières années se sont écoulées. Il faut apprendre à lire, à écrire. Les douleurs vont commencer. Le pédantisme réclame sa proie; il faut la lui abandonner. La mère va livrer son fils aux tyrans qui doivent l'abrutir. Ici l'enseignement universel expire; celui de l'Université commence. On sait comme il procède; on sait les pleurs qu'il fait verser, le temps qu'il fait perdre. On le sait ; ne le redisons pas, et revenons à l'enseignement universel que l'enfant n'aurait pas dû quitter.

Tendre mère, calme-toi ; ton fils ni ta fille ne s'éloigneront point de tes regards vigilans ; tu peux les instruire toi-même. Continue seulement l'enseignement universel que la nature et ton cœur t'avaient déjà indiqué.
 Prends Télémaque ; ne crains rien ; Télémaque est le livre de l'enfance, comme il est le livre de l'âge mûr. Toutes les idées que renferme Télémaque sont en germe dans l'âme tendre de ton enfant; le temps les développera. Lis devant lui, lis.

Ton enfant ne connaît ni Calypso ni Ulysse ; mais il apprendra à les connaître, comme il a appris à connaître les compagnons de ses jeux enfantins. Il lui est arrivé de ne pouvoir se consoler du départ de sa mère, et il comprendra que Calypso ne puisse se consoler du départ d'Ulysse.





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L
Si vrai tout ce passage à propos de la manière naturelle d'apprendreet en même temps si dangereux dans les mains ou sous la langue de quelqu'un qui n'a pas parcouru le chemin d'expérience décrit ici et pire qui se jetterait sur cette voie par dépit d'une autre et y pratiquerait les mêmes excès.
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